L'image est troublante, presque provocante. Invités à Moscou pour leur première rencontre d'après-guerre du Karabagh, les leaders arménien et azerbaïdjanais se sont retrouvés dans la position de vilains petits garnements convoqués par le directeur d'école.
Evidemment, le Net en a fait ses délices :
On sait que Vlad l'empaleur aime parfois tourner le cérémonial diplomatique de façon à se présenter en position de force ou, pour parler trivialement, montrer qui est le boss. Netanyahou en sait quelque chose, lui qui, un jour, a passé des heures à attendre dans les corridors de Sochi. Au moins était-il vraisemblablement assis, ce qui n'est pas le cas de tous...
Mais revenons au Caucase. Après avoir relativement (et logiquement, coincé qu'il était par ses engagements) brillé par son absence durant la guerre, l'ours revient en force dans la paix et reste le grand tireur de ficelles de la région, même s'il n'est plus tout à fait le seul.
Si peu a transpiré des quatre heures de discussion, l'accent a été mis sur le développement du Haut-Karabagh et le rétablissement voire l'extension des infrastructures. Ainsi, l'Arménie devrait être reliée à la Russie par un chemin de fer passant par... l'Azerbaïdjan !
Les prochains jours devraient nous apporter plus de précisions sur les autres modalités, et peut-être même sur les rumeurs concernant l'installation de trois bases turques chez son allié azéri, information démentie par Bakou et qui serait en contradiction flagrante avec les dispositions de l'accord de la Caspienne signé en 2018.
Toujours est-il que, diplomatiquement parlant, le Kremlin se pose en patron et fait une nouvelle fois taire les inepties savamment concoctées à l'automne par notre bonne MSN sur les "difficultés russes" qui, cette fois c'était sûr ma bonne dame, allaient enfin mettre Poutine dans l'embarras. Moscou semble au contraire sur une dynamique fortement ascendante, comme nous le montrerons bientôt dans la seconde partie du billet sur le tandem sino-russe.
Passons en Suède où un petit événement vient une fois de plus confirmer ce que nous expliquons depuis longtemps, à savoir que l’État profond américain et l'oligarchie mondialiste sont comme chien et chat, le premier passant son temps à sanctionner les pays avec qui la seconde voudrait faire des affaires. Nous ne pouvions d'ailleurs pas viser plus juste lorsque nous précisions : « Alors que le Deep State US s'en prend continuellement à la Chine, les multinationales ne demandent qu'à faire des affaires avec Pékin. »
Suivant les ordres du Washingtonistan, le gouvernement suédois a en effet interdit le chinois Huawei de toute participation à l'élaboration du réseau 5G. Mais pour l'une des plus grandes compagnies du pays, Ericsson, c'est une véritable catastrophe, son PDG appelant d'ailleurs les autorités à reconsidérer rapidement leur position.
L'explication est simple : le géant de la téléphonie réalise près de 10% de son chiffre d'affaire en Chine et un seul en Suède. Et la disproportion ne fera que s'accroître. La population de Shanghai représentant à elle seule le double de celle du pays scandinave, le calcul est vite fait...
Stockholm devrait bientôt se retrouver dans la même position que Berlin vis-à-vis de la Russie. Les élites économiques allemandes réclament à corps et à cris les gazoducs russes et la fin des sanctions alors que le pouvoir politique et l'appareil sécuritaire, noyautés par tonton Sam, font la danse du ventre, ne sachant plus s'il faut donner satisfaction au suzerain ou à l'industrie nationale.
Envolons-nous à présent vers le sous-continent indien où il s'en passe de belles. Fin décembre, les indépendantistes baloutches ont tué sept membres des forces paramilitaires pakistanaises protégeant les investissements chinois sur le colossal corridor de Gwadar, pièce capitale de l'échiquier eurasiatique.
L'article d'Asiatimes nous explique qu'après s'être calmées ces dernières années, les attaques connaissent une recrudescence depuis quelques temps. Il en attribue la cause à des facteurs divers et variés qui, au final, expliquent tout et rien à la fois. Si on ne peut pas nier leur existence, on relève toutefois une omission extraordinaire dans le papier en question : pas une seule fois n'est mentionnée l'Inde !
Elle est pourtant incontournable, comme l'expliquait déjà votre serviteur avant la naissance du blog :
Le Baloutchistan représente une zone de turbulence et d’instabilité récurrente qui peut se révéler aussi explosive pour le Pakistan que les zones tribales, bien que beaucoup moins médiatique.
Ayant constitué un royaume indépendant par le passé, les Baloutches ont vu d’un très mauvais œil la constitution de l’État pakistanais en 1947 et pas moins de cinq guerres insurrectionnelles ont eu lieu depuis, guerres que l’Inde est accusée d’avoir attisées afin d’affaiblir le frère ennemi. New Delhi a en effet tout intérêt à ce que la situation au Baloutchistan s'envenime, faisant ainsi d'une pierre deux coups : empêcher la Chine de s'implanter dans cette zone (plusieurs expatriés chinois y ont trouvé la mort) tout en déstabilisant le Pakistan, déjà englué dans les zones tribales et au Cachemire.
La région est d’une importance stratégique immense avec le nœud de Gwadar, port "donné" à Pékin au sortir du Golfe persique et autour duquel se tisse l’alliance stratégique et énergétique entre la Chine, le Pakistan et l’Iran.
Pendant des décennies, l'Inde a utilisé le Baloutchistan contre le Pakistan tout comme ce dernier a utilisé le Cachemire contre elle. New Delhi rendait ainsi la monnaie de sa pièce à Islamabad et en profitait aussi pour mettre une douloureuse épine dans le pied chinois.
Si les attaques dans la région ont diminué depuis cinq ans, n'est-ce pas parce que Modi avait décidé de se tourner vers Pékin ? Et si elles ont repris depuis quelques mois, ne faut-il pas tout simplement en trouver la cause dans un renouveau du soutien indien après les incidents de l'Himalaya de l'été dernier ? La coïncidence est en tout cas troublante...
Terminons sur une anecdote amusante qui montre à quel point le système impérial et son bras médiatique aiment parfois se noyer dans un verre d'eau. L’inénarrable Navalny ne semble plus tout à fait être en odeur de sainteté dans la presstituée, où il a, hélas pour lui, perdu quelques galons. Diantre, que s'est-il donc passé ?
Comme vous pouvez le voir, le bonhomme a commis un sacrilège impardonnable, se lâchant en imprécations contre la censure du Donald par les GAFAM. On imagine nos plumitifs suer à grosses gouttes et se prendre la tête à deux mains : Nous avons répété pendant quatre ans que Trump était la créature de Poutine, comment expliquer que le "principal opposant" à Poutine soit aussi un fan du Donald ? Bon allez, il devient simple "dissident", ça passera mieux...