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Sont-ce les grandissantes frictions, inavouées mais réelles, entre Russes et Turcs - de la Libye à la Syrie en passant par Hagia Sofia et même le gaz - qui ont fait revenir sur le devant de la scène l'incident du Sukhoi 24 ? Les fidèles lecteurs du blog s'en souviennent bien, c'était en novembre 2015 :

Au lendemain du mini acte de guerre turc contre la Russie, la tension ne diminue pas et ce n'est pas la timide tentative d'apaisement du premier ministre turc - "la Russie est un pays voisin et ami" - qui changera grand chose.. Poutine a, dans un discours d'une franchise rarement vue au niveau international, qualifié hier la Turquie de "complice des terroristes" et assuré que ce "crime ne resterait pas impuni".

Si l'on en croit les derniers développements, le terme de "crime" est difficilement contestable. Le copilote survivant a déclaré que le SU-24 n'avait reçu aucun avertissement. Nous avons aussi montré que si incursion il y a eu, elle n'a duré que quelques secondes, faisant dire à Lavrov que c'était une "provocation planifiée", ce que confirme aussi l'opposition turque. Quant à l'invraisemblable hypocrisie d'Ankara, elle est exemplifiée par le fait que les avions turcs ont violé à 2 244 reprises l'espace aérien grec en 2014 :

Les premières mesures russes sont dans la droite ligne de ce que nous prévoyions hier. Des S-400, peut-être le meilleur système anti-aérien du monde à l'heure actuelle, seront déployés à 30 km de la frontière turque, fermant le ciel syrien à l'OTAN. Comme si ça ne suffisait pas, le croiseur lance-missiles Moskva, équipé de systèmes antiaériens poussés, est arrivé à toute vapeur sur la côte de Lattaquié, prêt à descendre tout ce qui bouge. Les jets ottomans n'ont pas trop intérêt à traîner dans le coin...

Reste le plus important : l'armement des Kurdes. Gageons que s'il se réalise, il ne sera connu qu'une fois réalisé, Poutine mettant le sultan devant le fait accompli, vieille habitude russe...

Le mois suivant, nous précisions :

Les tensions russo-turques sont loin de s'apaiser, avec une possible nouvelle crise internationale, sur les détroits cette fois. Selon le traité de Montreux de 1936, le Bosphore et les Dardanelles sont ouverts à la navigation internationale ; Ben Erdogan ne peut donc stopper les bateaux russes qui continuent de faire voile vers la côte syrienne en provenance de la Mer noire. Voulue ou non, la provocation d'aujourd'hui a mis le sultan dans tous ses états. Alors que le Caesar Kunikov passait entre les deux rives d'Istanbul, un soldat russe a délibérément épaulé un lance-missile au vu et su de tous.

Fureur en Turquie où l'ambassadeur russe a été convoqué (ça devient une habitude ces derniers temps) et que certains ministres accusent Moscou de violer le traité de Montreux. Après avoir tué deux pilotes russes, le sultan s'attendait sans doute à voir les marins du Kunikov lancer des pétales de rose...

En plein dans le mille. Un tout récent article du respecté Nordic Monitor revient sur l'affaire. Selon des documents déclassifiés, ce missile, fourni au PKK kurde par les Russes, a très vraisemblablement été utilisé pour descendre un hélicoptère Cobra turc quelques mois plus tard.

L'avertissement était donc bien réel : œil pour œil, dent pour dent et hélicoptère contre avion. Depuis, sans surprise, les néo-ottomans ont consciencieusement évité de chauffer les oreilles de l'armée russe. La chose pourrait éventuellement être renouvelée si, d'aventure, le sultan empiétait par trop sur les platebandes russes et que la tension montait encore de quelques crans. Nous en sommes (encore ?) loin, mais le message du Bosphore est là pour le rappeler à tous, particulièrement à Ankara...

Tag(s) : #Russie, #Moyen-Orient

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