Si la vraie-fausse frappe donaldienne avait pour but de galvaniser les djihadistes modérés, c'est pour le moins raté. Le momentum est du côté des loyalistes et l'on sent comme une froide détermination du côté de l'alliance russo-syro-iranienne.
Au nord de Hama, front le plus important actuellement, les barbus ont perdu tous les gains si chèrement engrangés durant leur offensive de mars et l'armée syrienne est en mode attaque.
Les qaédistes se font vaporiser (en musique)...
... et l'aviation russe s'en donne à coeur joie lors de passages répétés avec des bombes massives (apparemment jamais utilisées jusqu'ici sur l'Idlibistan) ou des bombinettes-parachute :
Ce déluge de feu affaiblit sérieusement les défenses djihadistes, déjà passablement mises à mal, ouvrant la voie à l'armée syrienne. Depuis 72 heures, les villes tombent les unes après les autres dans le saillant de Hama. Pour libérer la pression, les rebelles ont tenté d'ouvrir un second front au sud, dans une petite poche qu'ils contrôlent entre Hama et Homs, mais elle a tourné court.
De leur côté, les forces loyalistes sises à Alep rongent leur frein en attendant de passer à l'attaque, au moins sur certains points. En filigrane, la grande offensive sur l'Idlibistan qui commence à se faire attendre...
Certes, prendre la dernière province rebelle (hors EI) sera tout sauf une partie de plaisir car s'y sont réfugiés à peu près tout ce que la Syrie compte de djihadistes. Mais cela signifierait également la fin de la guerre - cas Daech mis à part. Les barbus de l'Idlibistan avaient raclé les fonts de tiroir pour présenter 10 000 combattants lors l'offensive de mars sur Hama et celle-ci s'est terminée en eau de boudin. Une conclusion s'impose : ils ne sont plus capables de lancer de grandes offensives comme en 2013 ou 2015.
Ailleurs, les poches insurgées se comptent sur les doigts de la main et seront réduites tôt ou tard. Ainsi celle de l'est damascène où les combats font rage. Là comme ailleurs, les loyalistes avancent lentement, durement mais sûrement.
Tout au sud du pays, le front de Deraa s'est réveillé avec une offensive surprise d'un mix d'Al Qaida et d'ASL. L'aviation russe est très vite intervenue (une cinquantaine de bombardements) tandis que l'armée syrienne vient de recevoir d'importants renforts.
Rappelons que Deraa (cercle rouge) est toute proche des frontières jordanienne et israélienne et que les Sukhois évitaient généralement de vraiment bombarder la zone afin de ne pas effrayer Amman et Tel Aviv. Ce n'est apparemment plus le cas... Message subliminal : nous n'hésiterons pas à bombarder chaque centimètre de sol syrien si des djihadistes s'y trouvent, y compris à votre frontière.
Notons que dans la même région, Daech - qui occupe une poche bordant le Golan occupé par Israël - a fait des misères à l'alliance Al Qaeda-ASL.
Chose intéressante, un raid aérien syrien aurait été effectué très à l'est, à la frontière irakienne (triangle rouge-noir sur la carte), sur des cibles de l'EI. Or nous sommes ici comme qui dirait en "zone américaine". Si l'info se confirme, de deux choses l'une :
- ou les canaux de communication entre les QG russe et US ont été rétablis et l'on assiste à une nouvelle "tolérance" de Washington vis-à-vis d'Assad
- ou les Syriens sont sûrs d'eux (réception des systèmes anti-aérien ?) et marquent leur territoire (cf. démonstration de force russe à Deraa)
Dans les deux cas, c'est plutôt une mauvaise nouvelle pour les barbus...
C'est dans ce contexte qu'un kamikaze "modéré" a tué 130 civils dont 68 enfants près d'Alep il y a deux jours, lors d'un échange d'évacués. S'en est suivi une insurmontable réticence de la clique politico-médiatique occidentale à s'indigner. Que n'avait-on entendu sur le "boucher de Damas" après le false flag chimique de Khan Cheikhoun...
Là, les faits sont rapportés mais sans passion, sans hauts cris. Les condamnations des chancelleries occidentales sont sobres (doux euphémisme !) et tardives. Bref, le minimum syndical. Mais d'autres ne s'embarrassent même pas de ces scrupules, la palme de l'ignoble revenant sans doute à la BBC saoudisée qui a osé :
It happened when a vehicle loaded with food arrived and started distributing crisps, attracting many children, the BBC's Middle East correspondent Lina Sinjab said. Another vehicle then exploded.
She said it was not clear how the vehicle could have reached the area without government permission.
But there is also no evidence that rebels were involved in the attack, as the government claims.
Traduction : on ne peut savoir comment le véhicule est arrivé dans la zone sans permission du gouvernement (alors que c'était en plein territoire rebelle !) et il n'y a aucune preuve que les rebelles soient impliqués.
Quand on sait ce qu'était la vénérable BBC et quand on voit l'immondice qu'elle est devenue...