L'inexorable chute des cours du pétrole commence à avoir de sérieuses conséquences, les gros bras géopolitiques - à l'échelle mondiale (Etats-Unis, Russie) ou régionale (Arabie Saoudite, Iran) - étant également les plus gros producteurs d'or noir. Or, tous se retrouvent maintenant face à des défis difficiles.
En ouvrant les vannes afin de conserver leurs parts de marché (= mater la concurrence du schiste US, punir financièrement la Russie et couper l'herbe sous le pied de l'Iran "désanctionné"), les Seoud ont joué une carte bien dangereuse. Le gambit de Riyad n'a guère fonctionné jusqu'ici, pénalisant principalement l'Arabie Saoudite elle-même. Le déficit explose, les mesures d'austérité sont multipliées... Dangereux dans un pays où la dynastie régnante domine grâce à l'achat des fidélités des différents groupes sociaux/tribus/camarillas princières. Certains analystes considèrent même que Riyad est désormais à genou.
Mais les Seoud semblent décidés à entraîner tout le monde dans leur chute. Et d'abord l'ancestral ennemi perse. Si, avec la levée des sanctions, l'Iran comptait revenir en fanfare sur le marché pétrolier, c'est raté. Riyad a gâché le retour de Téhéran sur la scène internationale et plusieurs projets énergétiques sont annulés. L'OPEP survivra-t-elle à la lutte sans merci entre les deux rivaux ? Rien n'est moins sûr...
Les Etats-Unis ne sont pas dans une position beaucoup plus enviable et un site aussi sérieux que Oilprice.com se pose ouvertement la question de savoir si le schiste américain a atteint son point de capitulation. Le nombre de forages s'écroule et les producteurs n'ont plus de cash flow. Les banques ayant prêté à fonds perdus, la réaction en chaîne risque d'être pour le moins rude. Et comme si cela ne suffisait pas, la spirale déflationniste de l'or noir sabote le rôle du pétrodollar, déjà sérieusement remis en cause par la Russie et les BRICS.
Russie justement. Si l'ours a l'habitude de faire le gros dos et de gagner toutes les guerres d'usure auxquelles il a pris part, l'écroulement du prix du pétrole n'est pas sans conséquences. Certes, la situation financière de la Russie reste l'une des plus saines du monde, mais les revenus liés aux exportations d'or noir suivent sa cotation. Ainsi, de nouvelles coupes dans le budget fédéral semblent prévues (- 10%), qui remettent en cause certains projets, notamment spatiaux.
Le harakiri des Seoud provoque de sérieuses ondes de choc, tant au Texas qu'en Sibérie, ajoutant encore un peu plus à la complexité du grand jeu planétaire. La guerre d'usure est déclarée, qui fera ses victimes ; ceux qui y résisteront en sortiront renforcés.