Pendant que bruit la guerre en Syrie et au Yémen, que les tensions en mer de Chine augmentent, une autre bataille sourd dans l'ombre, plus silencieuse mais peut-être bien plus importante. Le monde que bientôt on appellera peut-être "libre" fait reculer l'unipolarité de l'empire.
C'est parti pour la banque des BRICS, grande concurrente des institutions financières sous la coupe américaine créées au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, qui va très bientôt financer son premier projet, dans le domaine des énergies renouvelables. Rappelons que cette banque, mise sur pied pas plus tard que l'année dernière, vise à dédollariser les financements de la planète, avec la conséquence indirecte de faire perdre aux Etats-Unis leur privilège inouï de vivre au-dessus de leurs moyens et de faire payer leurs guerres par le reste du monde via l'utilisation du dollar.
En marge du sommet du G20 - car désormais, les leaders BRICS profitent du G20 pour se rencontrer en plus de leur réunion annuelle -, le premier ministre indien Modi a également poussé à l'élaboration d'une feuille de route afin d'accélérer la coopération économique et commerciale entre les cinq membres. Et bien sûr, les échanges à l'intérieur du bloc délaissent de plus en plus le dollar au profit des monnaies nationales. Dernier exemple en date : l'Afrique du sud, dont les paiements en yuans augmentent de façon exponentielle. Multipliés par 7 depuis juin 2013, qui dit mieux ?
Les BRICS semblent également sur le point d'unir leurs efforts dans l'internet ultrarapide (G5) pour y contrer les Etats-Unis. Idée chinoise au départ, elle a été acceptée par les ministres de la communication des cinq pays à Moscou il y a un mois.
La lune de miel entre les deux locomotives de l'Organisation de Coopération de Shanghai se poursuit. La Russie fournira dès l'année prochaine à la Chine les fameux S400, sanctuarisant à peu près totalement le territoire de l'empire du Milieu contre tout menace extérieure (allo le Pentagone ?) L'Iran, qui entrera peut-être à la même date dans l'OCS, recevra aussi ses S300 en mars. En attendant la coopération spatiale avec Moscou... Nous avons vu à plusieurs reprises à quel point le rapprochement irano-russo-chinois s'accélérait ; presque chaque jour apporte une nouvelle pierre à l'édifice.
Enfin, comment ne pas parler de cette nouvelle étonnante : en marge du G20, le président de la Commission européenne, Juncker, a adressé une lettre à Poutine appelant à renforcer les liens commerciaux entre l'UE et l'Union eurasienne. L'ami Jean-Claude avait déjà fait le coup il y a deux mois dans un discours détonnant :
« Nous devons faire des efforts en vue d'une relation concrète avec la Russie. On ne peut pas continuer comme ça... L’influence des États-Unis sur les relations de l'UE avec d'autres pays doit cesser. La Russie doit être traité de façon décente... Nous ne pouvons pas laisser nos relations avec la Russie être dictée par Washington ».
Nous écrivions alors :
Diantre ! D'où vient cet accès de franchise de notre eurocrate en chef ? Quelques pistes :
- Il a bu
- Il est démissionnaire
- Il est suicidaire
- Il est excédé des clowneries de l'Ukraine, boulet que l'UE va maintenant, pour avoir voulu complaire aux désideratas de Washington, devoir se trimballer pendant longtemps.
Si la réponse est encore inconnue pour le chef de la Commission, les toutous européens d'Obama ne semblent pas pressés de déplaire à leur maître puisqu'ils viennent de s'accorder pour reconduire pour six mois les sanctions contre la Russie. Quelqu'un croit-il encore à la fable du prétexte ukrainien ? Un séparatiste du Donbass vient d'éternuer, peut-être veut-il contaminer l'Ukraine tout entière : nous devons prolonger les sanctions. Ca apprendra à Poutine à être gentil avec la France en Syrie... Le maître du Kremlin devrait ouvrir des livres sur le moyen-âge : un vassal est un vassal, toutes les gentillesses du monde ne lui feront pas trahir son suzerain.