Si OSS 117 devait faire ses valises pour aller "sauver le monde", la Baltique serait assurément dans le peloton de tête de ses destinations. Quelle tragi-comédie, mes aïeux...
Vous l'avez deviné, nous allons parler du tube de l'année, le gazoduc de la discorde, le morceau de métal qui divise l'OTAN comme jamais et enfonce un coin dans la "solidarité euro-atlantique" tout en faisant perler de grosses gouttes de sueur sur les fronts russes qui ne s'attendaient sans doute pas à devoir batailler de la sorte. Le Nord Stream II semble d'ailleurs presque avoir échappé tant à ses promoteurs qu'à ses détracteurs, devenant un objet autonome qui écrit son propre scénario, suit sa propre dynamique.
A peine digérée la farce Navalny, l'interminable roman-feuilleton énergético-stratégico-médiatico-juridico-politique vient de connaître un nouveau rebondissement rocambolesque avec la création, par le länder de Mecklembourg-Poméranie occidentale, d'une fondation écologique soutenant vocalement (et peut-être plus) la fin des travaux et la réalisation du pipeline !
La région en question, lieu d'arrivée du tube, est bien évidemment derrière le projet comme un seul homme. Et ses responsables semblent avoir bien vu ce que nous rapportions le mois dernier :
Les sanctions américaines sont d'un byzantinisme achevé. Nous venons de dire plus haut que le Congrès hésitait à sortir l'artillerie lourde pour ne pas se mettre à dos ses vassaux européens. Les nouvelles sanctions font une subtile distinction entre acteurs privés, sous pression, et gouvernements, qui ont plus de marge de manœuvre.
Bien que financée à 99% par Gazprom, la fondation est de nature publique et a la possibilité d'acheter machines et composants, une manière comme une autre de contourner les sanctions US. Les compradores allemands de l'empire ont été pris par surprise. Les Verts sont déconcertés tandis que, sans rire, l'Agence allemande pour l'environnement a porté plainte contre la fondation, arguant que son financement en faisait une institution privée. On le voit, notre Grand jeu se joue autant sur le terrain que dans les détails complexes et obscurs du droit administratif dont les avocats débattent sans fin dans les prétoires...
Quelque peu dépassée par les événements, Frau Milka en appelle à Joe l'Indien : « Au cours d'une conférence de presse, Mme Merkel a déclaré que certains litiges transatlantiques, dont celui qui porte sur le projet Nord Stream 2, devaient encore être réglés avec la nouvelle administration américaine. L'Allemagne et les Etats-Unis doivent "tout mettre sur la table", afin de clarifier dans quelle mesure Washington peut accepter ce projet, a-t-elle affirmé. »
La dernière phrase laisse rêveur et fait éclater tous les beaux discours sur la "souveraineté européenne" tant vantée par un certain amuseur public élyséen. Il n'en reste pas moins que, comme nous l'avons expliqué à plusieurs reprises, c'est paradoxalement Biden qui, soucieux de ne pas s'aliéner les vassaux euronouilliques, pourrait permettre la réalisation du tube qu'il déteste.
Nous en saurons plus au prochain épisode de notre telenovela gazière...