Fin du suspense : Tsipras a signé l'extension du Turk Stream en Grèce, ça sera le Turk Stream ET le Nord Stream 2 ! Gazprom a la folie des grandeurs...
Ca amène quelques remarques :
- si l'Allemagne a fait sa révolution copernicienne en acceptant de doubler ses importations de gaz russe par le Nord Stream, ça semble prouver ce que beaucoup pensent tout bas : le schiste US n'a jamais été une option, il était illusoire d'y croire. On notera au passage la totale hypocrisie allemande qui est anti-russe quand ça l'arrange...
- pour le gazoduc sud, il semble que Moscou ait changé sa stratégie : au lieu d'attendre patiemment que tous les pays de passage soient d'accord, au risque qu'un événement de dernière minute fasse capoter le tout (South Stream), Poutine construit d'abord et discute après. Le Turk Stream passera par la Turquie et la Grèce. Après ? On verra bien... Il sait parfaitement qu'une fois le gazoduc en place, la tentation sera trop grande pour y résister et les voisins réclameront aussi leur part. Et si les USA bloquent vraiment les Balkans (tentative de renversement du gouvernement en Macédoine), le gaz peut toujours prendre la direction de l'Italie (voir le rapprochement discret mais bien réel entre Moscou et Rome ces derniers mois) ou finir sur un terminal GNL.
- ce n'étaient pas des paroles en l'air (les Russes ne font jamais de com', ils vivent dans le réel) : l'Ukraine sera totalement marginalisée, plus une goutte de gaz n'y passera à partir de 2019. Punition terrible pour les dirigeants de Kiev qui vont commencer à regretter leur coup d'Etat... Dans quelques années, l'Ukraine exsangue pourrait bien retomber comme une pomme trop mûre dans les mains russes.
- Gazprom a vraiment la folie des grandeurs, c'est presque trop de bonnes nouvelles d'un coup. Ils sont maintenant engagés dans la construction simultanée des quatre plus grands pipelines de la planète ! Comment vont-ils financer tout ça ? Certes, ils ne sont pas tout seuls dans le Nord Stream 2, Shell, E.ON (Allemagne) et OMV (Autriche) vont participer ; certes, les Chinois vont financer une partie des travaux de l'Altaî et du Force de Sibérie. Mais enfin, quand même... Il y a deux ans, même dans leurs rêves les plus fous, ils n'auraient jamais pu imaginer en être là. Preuve supplémentaire que, en dépit de quelques difficultés économiques passagères, la crise ukrainienne a été du pain béni pour la Russie (Crimée russe, neutralisation définitive de l'Ukraine qui n'entrera jamais dans l'OTAN, développement des BRICS et de l'OCS, Union Eurasienne...)
Toujours à St Petersboug, Tsipras s'est lancé lors de son discours dans une charge contre l'Europe qui "se prend toujours pour le centre du monde". Les louanges aux BRICS et au monde multipolaire seraient-ils un appel du pied en vue de la sortie prochaine du système euro ?
En tout cas, nos petits propagandistes journalistes atlantistes se lamentent. Dans le Figaro, l'inénarrable Pierre Avril pleure à chaudes larmes : "Tsipras offre un cadeau politique à Poutine sans argent en retour - À Saint-Pétersbourg, devant Vladimir Poutine, le premier ministre grec ne s'est pas privé d'attaquer l'Europe et de vanter les promesses de développement offertes par les Brics (Brésil, Russie, Chine, Inde et Afrique du Sud) et l'ex-URSS."
Quant à l'ancienne directrice de la rédaction du Monde, la néo-conservatrice Nathalie Nougarayde qui bosse maintenant pour le Guardian britannique, elle a trouvé la parade : Poutine et Tsipras seraient en fait des humiliés qui pleurent sur l'épaule l’un de l'autre !
Ah les historiens du futur étudieront avec le sourire aux lèvres les délires présents...
Par contre, quasiment passé sous silence dans notre presse libre, le très sérieux rapport d'un institut autrichien qui montre que les sanctions et contre-sanctions sont susceptibles de faire perdre à la France 150 000 emplois et deux millions d'emplois à l'Europe !
Le Figaro, qui était l'un des commanditaires du rapport, n'a pu le cacher. Mal à l'aise, il a tenté de dédouaner la politique suicidaire de l'UE en blâmant la "crise économique russe" alors que c'est évidemment le régime de sanctions et contre-sanctions, et lui seul, qui est responsable de ce désastre.
Les journaux européens font de plus en plus penser à ça :