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Haro et rot sur l'arc chiite

L'empire ayant été incapable de mettre fin à l'arc chiite par la guerre en Syrie, une tentative de la dernière chance semble avoir vu le jour chez les petits génies de Washington. Ou "revu" plus exactement, si l'on considère que les inénarrables révolutions de couleur made in Soros commencent à prendre de l'âge...

De grosses manifestations ont donc fleuri sur le territoire des trois autres composantes de l'arc chiite, au Liban, en Irak et en Iran même. Une précision s'impose tout de suite : cette contestation n'a initialement (presque) rien à voir avec la sourde lutte engagée entre Téhéran et le système impérial. Comme souvent, les Américains enveniment habilement une situation pré-existante afin d'en tirer l'usufruit stratégique.

A Beyrouth et à Bagdad, la population est excédée par les petites magouilles entre amis et la corruption généralisée des autorités. En Iran, c'est la décision (d'ailleurs préconisée depuis longtemps par le FMI) de mettre fin aux généreuses subventions gouvernementales sur l'essence et le gaz qui a mis le feu aux poudres.

Mais très vite, des doutes sont apparus sur l'ingénuité des manifestations irakiennes tandis qu'au Liban, les habituelles officines tentent grossièrement de transformer les protestations en désaveu du Hezbollah. En Iran, enfin, l'immédiate flambée de violence doit être prise avec un certain scepticisme. On sait que dès qu'il le peut, le MEK, soutenu à bout de bras par Washington, met de l'huile sur le feu.

En vain pour l'instant, car le calme revient lentement mais sûrement dans l'ancienne Perse. Chez le voisin irakien, le combat à fleurets mouchetés entre Téhéran et Washington continue de plus belle. Au Liban, le Hezbollah manœuvre précautionneusement et pourrait même sortir renforcé de la crise, car moins touché par la vague de "dégagisme". La rupture de l'arc chiite n'est pas encore pour cette fois...

Bibidouillage

Poursuivi par la justice, Nétanyahou a peut-être joué l'une de ses dernières cartes en Syrie. Dans ce qui semble une réponse au lancement de plusieurs missiles sur le Golan, Israël a bombardé des sites au Sud de Damas. Les communiqués triomphants ("frappes dévastatrices") sont à usage interne et visent à sauver le soldat Bibi. Tel Aviv aurait prévenu les Russes douze heures à l'avance et les bâtiments ont été évacués, y compris par les "cibles iraniennes". Pour résumer d'une formule, Moscou a sauvé la vie des Iraniens et la face des Israéliens.

Au Nord, la situation se stabilise sur le front kurdo-turc. Comme prévu, le sultan devra se contenter de la zone comprise entre Rais al-Ain et Tell Abyad, à des années-lumière de ce qu'Ankara attendait :

Plus à l'Ouest, les bombardements sur l'Idlibistan n'ont jamais été aussi intenses. Est-ce le prélude à une invasion générale de la province barbue, attendue depuis longtemps et peut-être objet d'un troc entre Moscou et Ankara ? Depuis quelques jours, ça bouge déjà un peu sur le terrain, l'armée syrienne ayant pris quelques villages.

Another BRICS in the wall

Passé totalement sous silence dans la presse française (mais pas allemande), le sommet des BRICS a démenti les prédictions cassandresques de la MSN anglo-saxonne sur la mort du groupement. Certes, le dynamisme est moindre qu'en 2014, quand il établissait une banque parallèle au système financier international tenu par les Américains. Une crise économique a temporairement touché certains de ses membres (Brésil, Russie), dont l'un (le Brésil, encore lui) a vécu un putsch institutionnel.

Mais la multipolarité a ceci d'agaçant pour l'empire qu'elle avance inexorablement, entraînant dans son sillage toutes ses composantes, y compris celles qui connaissent des difficultés passagères. Loin d'être devenus une coquille vide, les BRICS reviennent petit à petit sur le devant de la scène.  Le sommet de Brasilia a été une réussite, chapeautant une foison de réunion de travail/projets/discussions dans des domaines divers et variés (économie, technologie, santé etc.) Et si Bolsonaro garde encore parfois quelques réflexes américanophiles, il a largement mis de l'eau dans sa caïpirinha depuis quelques temps et semble avoir réellement embrassé la cause multipolaire.

Qu'il est loin le temps des Vikings...

Les grands guerriers aventuriers doivent se retourner dans leur tombe en voyant ce que les pays scandinaves sont devenus. Si le Danemark a finalement eu une bouffée de courage en autorisant le Nord Stream II, son voisin suédois en est état de décrépitude avancée. Nous l'avons parfois évoqué sur ce blog  :

La Suède devrait peut-être changer sa devise royale För Sverige i tiden en un plus honnête Tel maître, tel vassal. Le pays scandinave, ou plus exactement son gouvernement, est en effet en pointe de la vague russophobe commanditée par Washington et ne manque pas une occasion de le faire savoir.

Ainsi, une petite info mérite le détour : le gouvernement régional du Gotland était d'accord pour louer des ports au consortium Nord Stream II, afin de faciliter la construction du gazoduc. Situation gagnant-gagnant : proximité géographique pour Gazprom, manne financière pour les municipalités de la région. Une visite à Stockholm et un "avis" gouvernemental plus tard, retournement de veste, il n'est soudain plus possible de louer ces ports de relâche. Le danger russe, vous comprenez...

Peu importe que la Suède soit devenue le n°2 mondial (derrière le Lesotho) en matière de viols, que le délitement de la société transforme ce pays naguère placide en "zone de guerre" et que les explications pipologiques de l'establishment fassent rire tout le monde. Non, vous comprenez, le principal danger qui guette la Suède est... la menace russe ! Ne craignant visiblement pas le ridicule, le ministère de la Défense en rajoute même une couche et ordonne aux villes de se préparer à une possible guerre avec la Russie, eh oui. Des siècles d'intelligence européenne, de pensée philosophique, de progrès scientifiques, pour en arriver là...

Stockholm vient à nouveau de s'enfoncer dans le ridicule avec l'affaire Assange. Il ne vous aura pas échappé que le parquet suédois vient d'abandonner ses poursuites contre le célèbre lanceur d'alerte. Maintenant qu'Assange a été arrêté par les sbires impériaux, le harcèlement judiciaire à son encontre, raison pour laquelle il s'était cloîtré à l'ambassade équatorienne de Londres, peut cesser. Comme c'est commode...

Tag(s) : #Moyen-Orient, #Amérique latine, #Europe

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